Le JUDO à pour ancetre le JU-JITSU, en effet Jigoro KANO etait un spécialiste du Ju-Jitsu qu'il avait étudié dans plusieurs écoles et dont il a extrait les techniques de projection et de contrôle que nous connaissont actuellement. La premiere mention qui en est faite, se trouve dans une ancienne histoire du japon datant de l'an 720. Il y est mentionne un tournoi de lutte tenu sous l'empereur SUININ, pendant la 7eme annee de son regne, soit en l'an 24 avant J.C.
Le mot JU-JITSU apparait en europe dans certains ouvrages publies avant 1600 en Hollande. (Periode TOKUGAWA). Avant l'apparition des armes a feu, les combats se deroulaient avec des armes de jet tel l'arc ou le javelot, ou pres avec le sabre, le couteau ou a mains nues (KUMI-UCHI). Le port des armes etant reserve aux nobles, le reste de la population, n'avait d'autre choix que de developer des techniques de combats a mains nues ou d'utiliser les outils agraires pour se defendre (KO-BUDO). Les moines ont jouer un role tres important dans le developpement et la diffusion de ces techniques, ils se deplacaient en effet tres souvent et n'etant pas nobles, n'avaient pas droit au port des armes. Il faut aussi mentionner des dessins represantant des postures et des mouvements etrangement semblables a ceux que nous connaissont aujourd'hui et qui ont etes releves sur une fresque egyptienne datant d'environ 2000 ans. Rappelons aussi, les techniques de lutte et de combat au baton qui étaient utilises plus pres de nous en Europe au moyen age. Ceci pour dire que les Arts Martiaux se developerent de manieres quasi universelle, mais qu'ils n'eurent sans aucun doute jamais, un développement aussi important qu'au Japon.
Une legende qui remonte au VI eme siecle de notre ere preside à l'origine du Ju-Jitsu. Elle raconte l'histoire d'un vieux medecin japonnais qui faisant une promenade en foret durant un rude hivers, par temps de neige, remarque comment de fines branches de pin, s'inclinaient sous le poids de la neige afin de s'en débarasser, et pouvaient ainsi se redresser sans dommages alors que les branches d'arbres plus robustes cassaient sous le poids. Le vieil homme comprit tout le parti que l'on pourrait tirer de la non résistance, et l'utilisation de la force de l'adversaire pour la retourner contre lui. L'harmonisation fut tres lente, en effet, les differents ecoles gardaient jalousement le secret de leurs techniques, d'autant plus qu'elles pouvaient être un atout majeur lors d'une rencontre sur un champs de bataille, ces techniques etant surtout utilisees lors de combat entre armees de seigneures rivaux. C'etait l'epoque de BU-JITSU (L'art du guerrier) et qui a durer du VII éme au XIII ème siecle pendant les grandes guerres civiles qui ont ravagees le pays. Suivra l'epoque du BU-GEI (entrainement du guerrier) qui verra apparaitre un debut de codification des techniques et d'apprentissage systematique. Des manuscrits illustres décrivent les prises et techniques, les premieres ecoles (RYU) apparaissent. Puis vint l'epoque du BUDO (la voie du guerrier). Suite a une tres longue periode de paix instoree par le shoguna (ere TOKUGAWA vers 1603) les batailles entre armees n'avaient plus lieux d'être et les ecoles se multiplieres et s'ouvrir au plus grand nombre. Vers le milieu des annees 1800, on dénombre 159 écoles majeures d'arts martiaux réparties en 8 familles dont le JU-JITSU. Ces écoles en se multipliants, evoluerent aussi et passèrent des JUTSU (arts, ensembles de recettes) vers les DO (voie, style de vie). Ainsi le IAÏ-JITSU devint le IAÏ-DO, l' AÏKI-JITSU devint l'AÏKIDO et le JU-JITSU le JUDO
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Jigoro Kano est ne en 1860 a
Kobe. Il vint a Tokyo en 1871 et fit de brillantes études a la faculté
des sciences politiques et de lettres.Délicat de santé, le jeune
Kano ne mesurait qu’un mètre cinquante et pesait à peine 48 kg.
A 16 ans, il décida de fortifier son corps, par la pratique de la gymnastique,
du rowing et du base-ball. Mais ces sports s’avérèrent trop durs
pour sa faible constitution. De plus, lors de querelles entre étudiants,
Kano était toujours battu. Blessé dans sa fierté de fils
de samouraï, il se décida d’étudier le ju-jitsu.Très
appliqué, persévérant et soucieux de technique, il devient
bientôt un expert pour son age Son premier professeur fut Hachi-nosuke
Fukuda, de l’école Tenjin-Shinyo-Ryu (1877). Sous la conduite de ce maître,
Kano s’initia aux mystères du ju-jitsu de l’Ecole du Cœur de Saule. En
1879, âgé de 82 ans, Fukuda mourut et Kano hérita de ses
archives. Il devint ensuite l’élève du maitre Iso, un sexagénaire
qui gardait le secret de l’école dérivant également de
Tenjin-hingo. Jigoro Kano s’entraîna tout en poursuivant ses études
et devient bientôt le vice-directeur de l’école. Malheureusement,
Iso mourut bientôt et notre jeune ju-jitsuka (expert en ju-jitsu) se trouva
à nouveau sans professeur. Il dévora tous les livres et documents,
mais un bon professeur lui restait indispensable. C’est alors qu’il rencontra
le maitre Likubo, qui lui apprit la technique de l’école de Kito. Jusqu’ici,
il avait travaillé les luttes en corps à corps avec des vêtements
de ville ; l’école de Kito allait lui enseigner le combat avec armure.
Peu à peu, Kano fit la synthèse des diverses écoles et
voulut créer sa propre discipline, tout en s ‘entraînant avec le
maître Likubo jusqu’en 1885. En février 1882, il s'installait,
âgé de 22 ans, dans le petit temple bouddhique d’Eishoshi, secte
Jôgo. C’est dans ce temple, berceau du judo, que Jigoro Kano installa
un premier dojo (salle où l’on étudie la voie). Habitant dans
les dépendances du temple avec quelques élèves et une vieille
servante, il se mit patiemment à élaborer sa nouvelle méthode.
Quel but visait-il ? Mettre au point un système d’éducation physique
et de formation du caractère, basé sue le ju-jitsu. Mais cette
technique possédait de grandes qualités et de grands défauts.
Il fallait l’élaguer et en faire un moyen d’entrainement similaire à
celui de certains sports occidentaux. Kano fit la synthèse des meilleures
techniques de ju-jitsu. Il choisit les prises les plus efficaces et les plus
rationnelles. Il élimina les pratiques dangereuses et peu compatibles
avec le but élevé qu’il visait. Il perfectionna la manière
de tomber et inventa le principe des brises-chutes. Il créa un vêtement
spécial d’entraînement (le judogi), l’antique tenue des ju-jitsukas
provoquant trop fréquemment des blessures. Il mit particulièrement
au point les méthodes de projections, en inventant d’ailleurs quelques-unes.
Le ju-jitsu était une pratique guerrière basée sur la souplesse
du corps et de l’esprit. Kano pensa que son nouvel art devait porter un autre
nom, puisque le but poursuivi était différent. Il recherchait
un art de vivre, basé sur une utilisation meilleure de l’énergie
humaine. Il nomma cette science nouvelle « judo ».et baptisa sa
petite école Kodokan
Ce fut la période héroïque, celle des défis lancés
par d'autres écoles et le triomphe des champions du Kodokan, dont la
renommée allait devenir universelle.
A la fin de sa vie, il a fait des conférences au cours desquelles il
souligne l'interet primordial de l'aspect éducatif du Judo (entraînement
physique, arme défensive, mais surtout école de sang-froid et
de maîtrise de soi).
Les luttes de prestige entre le Kodokan et les vieilles écoles de jujitsu,
les défis, combats et triomphes, inspirèrent de véritables
chansons de gestes semblables à celles de l'époque féodale.
Le jeune élève
de Kano, Shino Saïgo, surnommé "le chat" à cause
de son extraordinaire souplesse et de son don pour l'équilibre, fût
à l'époque, l'un des plus fameux champions du Kodokan et demeura
invaincu. Il est le héros d'un roman populaire au Japon : le Sugata Sanchiro.
Bientôt, d'anciennes écoles d'arts martiaux assimilèrent
le nouveau sport et sa discipline.
Avec son formidable esprit de synthèse, qui a fait de lui le créateur
de ce nouveau sport, Kano était d'une activité débordante
et d'un dynamisme que l'âge ne ralentit jamais. Il préparait des
plans, dressait des rapports et organisait des missions. Yamashita, Tomita,
Isogaï, Yokoyama, parmi ses plus anciens et célèbres disciples,
voyagèrent dans le monde entier, contribuant ainsi à faire connaître
le judo dans le monde. Kano lui même effectua de nombreux déplacement,
à la fois comme fondateur du Kodokan mais aussi comme délégué
olympique du Japon. Il fut, relativement jeune, membre du Comité olympique(1909
et de l'association physique nippone(1911)
Il se rendit pour la dernière fois en France à l'occasion de la
réunion du Comité Olympique au Caire en 1938 car les jeux devaient
se dérouler à Tokyo en 1940.
Il mourut le 4 mai 1938 sur le chemin du retour à 6h30 du matin à
bord du Hikawa-maru, deux jours avant de toucher Yokohama.
Depuis lors et surtout après la guerre, le Kodokan , installé
dans le quartier de Sudobashi à Tokyo, s'est considérablement
agrandi, un nouveau bâtiment fut même créé voici quelques
années et un grand nombre de ceintures noires ont été gradées
suivant ses règlements.
Le judo , à présent, est enseigné dans toutes les écoles et universités japonaises. Il s'est répandu dans le monde entier: les écoles, la police, l'armée et des clubs sportifs toujours plus nombreux
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Le judo fut enseigné dès 1882, au Dojo de Jigoro Kano, baptisé "Kodokan" ou "école pour étude de la voie".
Le premier élève s'inscrivit le 5 juin 1882; Ces premiers élèves étaient âgés de 15 à 18 ans. Kano les hébergeait et s'occupait d'eux comme un père. Ce fut une période passionnante, mais difficile; le jeune professeur était sans argent et le tapis mesurait à peine 20 m2. L'année suivante le dojo avait grandi et son tapis mesurait quelques 40 m2.
Deux ans plus tard Kano fit construire un Dojo dont le tapis mesurait près de 80 m2. Les rencontres entre diverses écoles de Ju-jitsu se multiplièrent. Le Kodokan remporta sa première victoire en 1886. Des sections du kodokan se fondèrent à Nirayama.
Lorsque Kano entreprit ses premiers voyages autour du monde, il confia à ses meilleurs élèves la direction du kodokan
En 1887 une école nationale de tous les arts martiaux est crée par le gouvernement japonais, c'est le Butokukai. Bien que placée sous l'égide de Kano cette école ne tardera pas à devenir rivale du Kodokan. Quelques années plus tard apparaît le Kosen créé par l'université impériale de Tokyo.
Malgrè la concurrence le Kodokan continue son ascension, son dernier dojo est le plus grand du Japon: 185 m2, peu de temps après cette surface est portée au double.
En 1909 le Kodokan devient institution publique, c'est à cette époque que les katas établis pour le Butokukai sont enseignés. Par la suite une section féminine est ouverte, de plus le kodokan se voit doté d'associations culturelles et de comités de recherche.
C'est en 1934 que le Kodokan est logé dans un nouveau bâtiment de trois étages. Il possède 2000 m2 de tapis. On dit désormais du Kodokan qu'il est la Mecque du Judo.
Après la défaite du Japon, les Américains interdirent toutes les activités inspirées du Bushido, les arts martiaux furent prohibés et les professeurs du Kodokan furent seulement autorisés à enseigner aux troupes américaines.
Le judo fut permis plus tard avec la dénomination sport et non art martial.
En 1958 un nouveau bâtiment héberge le Kodokan, il est beaucoup plus spacieux et moderne que le précédent, en outre son tapis immense. Il abrite des salles spéciales réservées aux femmes, aux enfants, aux élèves particuliers, il héberge aussi des instructeurs à demeure.
L'objet de cette conférence est de vous expliquer, d'une manière générale, ce qu'est le Judo. A notre époque féodale, il y avait une quantité d'exercices guerriers, tels que la lutte, le tir à l'arc, l'usage des lances, etc. Parmi ces exercices, il y en avait un, appelé Ju-Jutsu. C'était un exercice complexe qui comprenait principalement les moyens de combattre sans armes, tout en se servant à l'occasion de poignards, de sabres et autres armes. Les procédés d'attaque consistaient surtout à jeter, à frapper, à suffoquer, à immobiliser l'adversaire au sol, à courber ou à entrelacer les bras ou ses jambes de manière à provoquer une douleur ou une fracture. On enseignait aussi l'usage du sabre et du poignard. Nous avions en même temps de nombreuses manières de nous défendre contre des attaques de ce genre. Cet exercice, dans sa forme primitive, existait dès notre époque mythologique, mais son enseignement systématique en tant qu'art date d'il y a 350 ans, à peu près.
Dans ma jeunesse, j'ai étudié cet art avec trois maîtres éminents de l'époque. Le grand profit que j'ai tiré de cette étude m'a conduit à la décision de m'adonner plus sérieusement à elle et c'est ainsi qu'en 1882, j'ai fondé moi-même une école que j'ai appelé KODOKAN. "KODOKAN" signifie "une école pour étudier la manière", le sens réel du mot manière étant la conception de la vie. J'ai appelé le sujet que j'enseigne Judo au lieu de Ju Jutsu. Je vous expliquerai d'abord la signification de ces mots, "JU" signifie souple ou céder; "JU-TSU" est un art ou un procédé technique; "DO" le moyen ou le principe, de sorte que le Ju-Jutsu signifie un art ou une pratique de la souplesse, qui consiste à céder d'abord afin d'avoir la victoire finale, Judo signifie le moyen ou le principe de cette action.
Voyons maintenant ce que c'est que cette souplesse ou cet art de céder "JU". Supposons que nous estimions la force d'un homme en unités. Admettons que la force de l'homme qui est en face soit représentée par 10 unités, tandis que ma force, moindre que la sienne, soit représentée par 7 unités. Dans ces conditions, s'il me pousse de toute sa force, je serai certainement poussé en arrière ou jeté au sol, même si je me sers de toute ma vigueur contre lui. Cela arriverait parce que je me serais servi de toute ma force contre lui, alors que si je cède à sa force en retirant mon corps juste avant qu'il ait poussé et en prenant soin en même temps de garder mon équilibre, il sera forcé de se pencher en avant et de perdre ainsi son équilibre.
Dans cette nouvelle position, il peut être
devenu si faible (non pas en force physique, mais à cause de sa position
gênante) que sa force se trouve représentée à ce
moment, disons par 3 unités au lieu de 10 unités normales. Mais
pendant ce temps, moi-même, en gardant mon équilibre, j'ai conservé
toute ma force qui était primitivement représentée par
7 unités et me trouve donc momentanément dans une position avantageuse
et je peux triompher de mon adversaire en me servant seulement de la moitié
de mes forces, soit 3 unités et demie contre ses 3 unités. Cela
laisse à ma disposition la moitié de mes forces en cas de besoin.
Si j'avais une force supérieure à celle de mon adversaire, j'aurais
pu naturellement le repousser, même dans ce cas, c'est à dire,
si j'avais voulu le repousser et si j'avais eu le pouvoir de le faire, j'aurais
dû tout de même céder, d'abord parce qu'en procédant
ainsi j'aurais grandement économisé mon énergie.
Voici un exemple : supposons que nous nous promenions le long d'une route de
montagne, avec un précipice sur le côté et que cet homme
ait subitement sauté sur moi en essayant de me jeter dans le précipice.
En pareil cas, je ne pourrais pas éviter d'être jeté dans
l'abîme si j'essaie de lui résister. Mais au contraire, si je lui
cède en faisant tourner mon corps et en tirant mon adversaire vers le
précipice, je peux facilement le jeter par-dessus bord et en même
temps poser mon corps au sol.
Je pourrais multiplier ces exemples à l'infini, mais je pense que ceux que j'ai donnés seront suffisants pour vous permettre de comprendre comment je peux battre un adversaire en cédant, et comme il y a dans le Ju-Jutsu un très grand nombre de cas dans lesquels le principe est appliqué ; le nom de Ju-Jutsu (c'est à dire l'art de la souplesse ou l'art de céder) est devenu le nom de cet art tout entier.
Mais à parler rigoureusement, le véritable Ju-Jutsu est quelque chose de plus. Les moyens de gagner la victoire sur un adversaire par le Ju-Jutsu ne consiste pas uniquement à obtenir la victoire en cédant d'abord. Quelquefois nous frappons, nous donnons des coups de pied, nous étranglons l'adversaire et ce sont là des formes différentes d'action positive opposées à l'art de céder. Quelquefois l'adversaire se saisit de mon poing. Comment puis-je me libérer sans user de ma force contre la prise de mon adversaire ? On peut dire la même chose lorsque quelqu'un me saisit par derrière. Si donc le procédé qui consiste à céder ne peut pas expliquer toutes les méthodes dans le combat de Ju-Jutsu, y a-t-il un principe s'applique réellement à tous les cas ? Oui, il y en a un : c'est le principe de l'efficacité maximale dans l'usage de l'esprit et du corps et le Ju-Jutsu n'est pas autre chose qu'une application de ce principe tout à fait général à l'attaque et à la défense. Ce principe peut-il s'appliquer dans d'autres champs de l'activité humaine ? Oui, le même principe peut s'appliquer à l'amélioration du corps, servir à le rendre fort, sain et utile, c'est ce qui constitue l'Education Physique. Il peut aussi être appliqué au développement de la force intellectuelle et morale. Il peut également être appliqué à l'amélioration du régime de nourriture, du vêtement, de l'habitation, de la vie de société, de l'activité, d'affaires et ce qui constitue l'étude et l'entraînement concernant la manière de vivre. J'ai donné à ce principe d'une absolue généralité le nom de Judo. Ainsi le Judo, au sens large est une étude, un procédé d'entraînement applicable à l'esprit et au corps aussi bien en ce qui concerne la direction de la vie et des affaires.
Le Judo sous un de ses aspects, peut être étudié et pratiqué avec l'attaque et la défense pour objet. Avant que j'eus fondé le KODOKAN, cette application du Judo à l'attaque et à la défense était seule étudiée et pratiquée au Japon sous le nom de Ju-Jutsu. On l'appelait quelquefois Taï-jutsu, ce qui signifie l'art de dirigé le corps ou Yawara, la direction souple. Mais j'acquis la conviction que l'étude du principe, dans toute sa généralité, est plus importante que la simple pratique du Ju-Jutsu, parce que la réelle intelligence de ce principe ne nous permet pas seulement de l'appliquer à tous les aspects de la vie, mais nous rend encore de grands services dans l'étude de l'art du Ju-Jutsu lui-même.
Ce n'est pas seulement par le procédé que j'ai suivi que l'on peut réussir à saisir ce principe. On peut arriver à la même conclusion par une interprétation philosophique des opérations quotidiennes en affaires ou par un raisonnement philosophique abstrait.
Cependant, quand j'ai commencé à enseigner, je pensais qu'il convenait de suivre la même route que j'avais prise moi-même dans l'étude du sujet, parce qu'en procédant ainsi je pouvais rendre le corps de mon élève sain, fort et utile. En même temps, je pouvais l'aider peu à peu à saisir le principe lui-même dans toute son importance.
C'est pourquoi, j'ai commencé l'enseignement du Judo par les exercices du Randori et du Kata.
Le Randori, mot qui signifie "libre exercice", se pratique dans les conditions d'un duel réel. Il comprend les actes de jeter par terre, d'étouffer, de maintenir l'adversaire par terre, de courber ou de tordre ses bras ou ses jambes. Les deux combattants peuvent se servir de n'importe quel procédé, pourvu qu'ils ne se blessent pas l'un l'autre et qu'ils respectent les règles du Judo en manière d'étiquette.
Le Kata, mot qui signifie littéralement "forme" est un système formel d'exercices combinés d'avance, y compris les actes de frapper, de trancher, de donner des coups de pieds, de percer, etc... Selon les règles en vertu desquelles chaque combattant sait d'avance exactement ce que son adversaire va faire. L'entraînement aux actes de frapper, de donner des coups de pieds, de trancher, de percer est enseigné en Kata et non en Randori, parce que si on en usait en Randori, il pourrait se produire fréquemment des blessures, tandis que lorsqu'il est enseigné en Kata, il ne peut se produire aucune blessure parce que toutes les attaques et les défenses sont arrangées d'avance.
Il y a une autre forme que j'ai appelée "forme de l'attaque et la défense". Dans celle-ci j'ai combiné différentes formes d'attaque et de défense de manière telle que le résultat conduira à l'harmonieux développement du corps tout entier. Les méthodes ordinaires d'attaque et de défense enseignées dans le Ju-Jutsu ne peuvent être considérées comme idéales pour le développement du corps.
Je les ai donc spécialement combinées de façon à ce qu'elles remplissent les conditions nécessaires pour le développement harmonieux du corps. J'obtiens ainsi deux résultats :
1) Le développement du corps
2) L'entraînement dans l'art du duel.
Comme toute nation doit songer à sa propre défense, tout individu doit savoir comment se défendre. En cet âge de lumière, personne ne doit se soucier de se préparer soit à une agression nationale, soit à l'exercice de la violence contre autrui. Mais la défense dans l'intérêt de la justice et l'humanité, ne doit jamais être négligée ni par une action, ni par un individu.
Cette méthode de l'éducation physique sous la forme de l'attaque et de la défense, je vais vous montrer ce qu'elle est dans sa pratique réelle. Elle se divise en deux sortes d'exercices : d'un côté, les exercices individuels et de l'autre les exercices avec un partenaire. D'après ce que j'ai expliqué et montré par la pratique, vous avez certainement compris ce que j'entends par l'éducation physique fondée sur le principe de l'efficacité maximum. Quoi que je soutienne avec force que l'éducation de toute une nation doit se fonder sur ce principe, je n'entends pas diminuer pour autant le mérite de l'athlétisme ou des diverses sortes d'exercice militaires. Quoiqu'on ne puisse pas les considérer comme convenant à l'éducation physique de toute une nation, néanmoins en tant que culture d'un groupe ou de certains groupes de personnes, ils ont leur valeur spéciale et je ne veux en aucune manière les décourager.
Un grand mérite du Randori se trouve dans l'abondance des mouvements qui sont bons pour le développement physique. Un autre mérite est que tout mouvement a un objet et se trouve exécuté avec entrain, tandis que dans la gymnastique ordinaire les mouvements d'exercice manquent d'intérêt. L'objet d'un entraînement physique systématique dans le Judo n'est pas seulement de développer le corps, mais de rendre un homme ou une femme capable d'exercer un contrôle parfait sur son esprit et sur son corps et de les rendre prêts à faire face à n'importe quelle circonstance, qu'il s'agisse d'un simple accident ou d'une attaque commise par autrui.
Quoique les exercices de Judo soient généralement effectués par deux personnes, à la fois en Kata et en Randori, et dans une salle spécialement préparée à cet effet, cependant ce n'est pas absolument nécessaire. Ils peuvent être pratiqués par un groupe ou par une personne, sur un terrain de jeu ou dans une salle ordinaire. On imagine que la chute dans le Randori est accompagnée de souffrance et quelquefois de danger. Mais une courte explication de la manière dont on vous apprend à tomber, vous permettra de comprendre qu'il n'y a ni souffrance, ni danger.
Je vous parlerai maintenant de l'aspect intellectuel du Judo. L'entraînement mental en Judo peut être réalisé par la méthode Kata ou la méthode Randori, mais plutôt par la seconde. Comme le Randori est un exercice entre deux personnes qui se servent de toutes les ressources dont elles disposent et qui obéissent aux règles du Judo, les deux partenaires doivent toujours être en état d'alerte et chercher à découvrir les points faibles de l'adversaire en se tenant prêt à attaquer dès que l'occasion le permet. Une telle attitude d'esprit dans la recherche des moyens d'attaque tend à rendre l'élève attentif et franc, prudent et réfléchi dans toutes ses actions. En même temps, il est entraîné à prendre des décisions rapides ou si l'on n'agit pas promptement, on perdra toujours l'occasion soit dans l'attaque, soit dans la défense.
En outre, dans le Randori, chaque partenaire ne peut pas dire ce que son adversaire va faire, de sorte que chacun doit toujours être prêt à parer n'importe quelle attaque brusque, tentée par l'autre. Habitué à cette attitude mentale, l'homme acquiert un haut degré de maîtrise de soi. L'exercice du pouvoir d'attention et d'observation dans la salle d'entraînement développe naturellement ce pouvoir qui est si utile dans la vie quotidienne.
Pour trouver les moyens de battre un adversaire, l'exercice des facultés d'imagination, de raisonnement de sensation et de jugement est indispensable et ces facultés se développent naturellement dans le Randori. En outre, comme l'étude du Randori est l'étude des relations qui existent entre deux adversaires rivaux, on peut tirer de cette étude des centaines de leçons utiles. Je me contenterai, pour le moment, de donner encore quelques exemples : dans le Randori, nous apprenons à l'élève à agir toujours selon le principe fondamental Judo, sans qu'il ait à considérer combien son adversaire peut lui sembler physiquement inférieur ou même s'il peut facilement par la simple force, triompher de l'autre. S'il agit contre ce principe, l'adversaire ne sera pas convaincu de sa défaite, quelle qu'ait été la force brutale qu'on ait employée contre lui. Il est à peine nécessaire d'attirer votre attention sur le fait que le moyen de convaincre votre adversaire dans un argument n'est pas de remporter tel ou tel avantage sur lui en vertu de la puissance du savoir ou de la richesse, mais de le persuader en appliquant des règles invariables de logique. Cet enseignement que la persuasion et non la coercition est efficace - enseignement d'une si grande valeur dans la vie réelle - nous pouvons l'apprendre dans le Randori.
En outre, nous apprenons à notre disciple, quand il a recours à un procédé pour venir à bout de son adversaire, à n'employer juste que la quantité de sa force qui est absolument nécessaire pour l'objet en question et nous le mettons en garde contre l'emploi de trop ou trop peu de force. Il y a grand nombre de cas dans lequel les gens échouent dans leur entreprise, simplement parce qu'ils vont trop loin, ne sachant où s'arrêter et vice-versa.
Pour prendre encore un autre exemple, dans le Randori, nous enseignons à notre disciple, quand il se trouve en face d'un adversaire qui est follement excité, à gagner la victoire non pas en résistant directement à l'adversaire par la force et par la violence mais en l'amusant jusqu'à ce que son énergie même se soit dépensée.
L'utilité de cette attitude dans les transactions quotidiennes est évidente. Comme on le sait, il n'y a pas de raisonnement qui puisse nous être utile quand nous sommes en face d'une personne tellement agitée qu'elle a perdu le contrôle d'elle-même. Tout ce que nous avons à faire en pareil cas est d'attendre jusqu'à ce que sa passion se soit épuisée d'elle-même. Tout cela, nous l'apprenons dans la pratique du Randori. L'application de ses règles à la conduite des affaires quotidiennes est un sujet d'études très intéressant et a du prix comme entraînement intellectuel pour de jeunes esprits.
J'achèverai mon développement sur l'aspect intellectuel du Judo en parlant brièvement des moyens rationnels d'augmenter la connaissance et la puissance intellectuelle. Si nous observons avec soin l'état actuel des choses dans la société, nous constatons partout la manière dont nous dépensons sottement des occasions d'obtenir des connaissances utiles et pourtant est-ce que nous ne négligeons pas de profiter de pareilles occasions ? Faisons-nous toujours les meilleurs choix pour les livres, les revues et les journaux que nous lisons ? Ne constatons-nous pas souvent que l'énergie, qui pourrait avoir été dépensée pour l'acquisition d'une connaissance utile, est souvent employée à l'acquisition d'une connaissance qui n'est pas seulement préjudiciable à nous-même mais aussi à la société.
En dehors de l'acquisition d'une connaissance utile, nous devons chercher à améliorer nos facultés intellectuelles, telle que la mémoire, l'attention, le jugement, le raisonnement, l'imagination, la perception etc... Mais cela, nous ne devons pas le faire au hasard, mais conformément aux lois psychologiques de sorte que les rapports de ces facultés les unes avec les autres se maintiennent en bonne harmonie. C'est seulement en suivant fidèlement le principe de l'efficacité maximum - c'est à dire le Judo - que nous pouvons obtenir ce résultat d'accroître raisonnablement notre savoir et notre puissance intellectuelle. Je vous parlerai maintenant de l'aspect moral du Judo. Je n'ai pas l'intention de parler de la discipline morale donnée aux élèves dans la salle d'exercices, comme l'observation des règles traditionnelles d'étiquette, le courage, la persévérance, la bienveillance, le respect des autres, l'impartialité et la loyauté qui ont tant d'importance dans les sports athlétiques dans le monde entier.
L'entraînement dans le Judo a une signification morale particulière au Japon, parce que le Judo en même temps que les autres exercices guerriers était pratiqué par nos Samouraïs, qui avaient un code raffiné de l'honneur, dont l'esprit nous a été légué à travers l'enseignement de cet art. A ce sujet, je voudrais vous expliquer comment le principe de l'efficacité maximum nous aide à améliorer la conduite morale. Il arrive qu'un homme soit très excitable et prompt à se mettre en colère pour des raisons insignifiantes. Mais quand il en vient à se rendre compte que le fait "d'être excité" constitue une dépense inutile d'énergie qui ne sert à personne et qui bien souvent fait du mal au sujet, aussi bien qu'aux autres personnes, l'élève de Judo doit éviter une pareille conduite. Il arrive aussi qu'un individu soit découragé par la suite d'une déception, soit triste, n'ait pas de courage au travail. En pareil cas, le Judo conseille de rechercher quelle est la meilleure ressource que l'on peut trouver dans les circonstances données. Si paradoxal que cela puisse paraître, un individu est, de mon point de vue, dans la même position que celui qui se trouve au zénith du succès. Dans l'autre cas, il n'y a qu'une méthode à suivre : à savoir, faire ce qu'il pense être le mieux à ce moment. C'est ainsi que l'enseignement du Judo, peut-on dire, conduit un homme au fond du découragement à un état d'activité énergique avec de brillantes espérances d'avenir.
On peut raisonner de même pour les personnes qui sont dans un état de mécontentement. Les personnes mécontentes sont souvent dans un état d'esprit morose et blâment les autres gens au lieu de s'occuper de leurs propres affaires. L'enseignement du Judo fera comprendre à ces personnes qu'une pareille conduite est contraire au principe de l'efficacité maximum et les amènera à se rendre compte qu'en observant fidèlement ce principe, elles reprendront leur bonne humeur. Voilà comment l'enseignement du Judo peut à bien des égards aider à l'amélioration de l'attitude morale.
Finalement je veux ajouter quelques mots concernant l'aspect émotionnel et esthétique du Judo. Nous connaissons tous la sensation agréable que nous donnent les muscles par l'exercice, et nous éprouvons également du plaisir à obtenir de l'habileté dans l'usage de nos muscles et aussi par le sentiment de supériorité à l'égard des autres dans le combat. Mais en dehors de ces plaisirs, il y en a un qui tient à ce fait que l'on prend des attitudes gracieuse, que l'on accomplit des mouvements qui ont de la grâce et que l'on voit les autres faire de même. Un entraînement donné à cet égard joint au plaisir que l'on peut éprouver à observer différents mouvements qui symbolisent des idées variées, voilà ce qui constitue ce que nous appelons le côté émotionnel et esthétique du Judo.
Je crois que vous avez déjà réussi à voir ce qu'est en réalité le Judo en tant qu'il se distingue du Ju-Jutsu des temps féodaux. Si maintenant, je cherche à énoncer d'une façon concise ce que je vous ai expliqué, je le résumerai de la façon suivante : Le Judo est une étude et un entraînement concernant l'esprit et le corps, aussi bien que la direction individuelle et des affaires.
A la suite d'une étude approfondie des différentes méthodes d'attaque et de défense, je suis arrivé à cette conviction que tout cela dépend de l'application d'un principe absolument général qui est le suivant :
"Quelque soit l'objet que l'on a en vue, le meilleur moyen de l'atteindre est d'user de son corps et de son esprit à cette fin qui donne le maximum d'efficacité". Ce même principe appliqué à la culture physique, mentale et morale aussi bien qu'aux manières de vivre et de conduite des affaires constitue l'étude des choses ou l'entraînement dans ces choses.
Une fois qu'on a bien compris l'importance réelle de ce principe, il peut être appliqué à tous les aspects de la vie et de l'activité et nous permettre de mener la vie la plus haute et la plus rationnelle.
Pour comprendre vraiment ce principe, il n'est pas nécessaire de passer par l'entraînement concernant les méthodes d'attaque et de défense, mais comme je suis arrivé à concevoir cette idée par le moyen de l'entraînement dans ces méthodes, j'ai fait un entraînement pour le développement du corps, un moyen d'atteindre le principe.
Le principe de l'efficacité maximum quand on l'applique en vue de donner la clé de la vie sociale ou de la perfectionner aussi bien que quand on l'applique à la coordination de l'esprit et du corps - dans le sens de l'attaque et de la défense - demande en premier lieu l'ordre et l'harmonie parmi les membres et cela ne peut être obtenu que par l'aide mutuelle et par les concessions qui conduisent à un bien-être et à des bénéfices réciproques.
Le but final du Judo est donc d'inculquer à l'homme une attitude de respect pour le principe de l'efficacité maximum, du bien-être, de la prospérité mutuelle et de le conduire à observer ces principes.